La lettre de Mathilde
13 avril 1912, Mathilde aurait jeté une bouteille à la mer. On aimerait y croire, mais des doutes nous poussent à mener une enquête sur ce sujet, en demandant à des spécialistes des informations pour confirmer ou infirmer cette histoire…
Etape 1: l’écriture
Malheureusement, nous n’avons pas d’autres écrits de Mathilde! Donc nous devons forger notre opinion sur la base de cette lettre. Notre première réaction est de penser que le style de l’écriture est trop mature pour avoir été écrit par une enfant de 13 ans.
Nous sommes alors partis à la recherche d’autres écrits d’enfants de cet âge, en cherchant des informations sur un examen que l’on passait à cet âge jusqu’à une période récente: le certificat d’études. C’est le musée national de l’éducation situé à Rouen qui va avoir la gentillesse de nous fournir des indices intéressants. Son directeur adjoint et son service communications vont nous fournir des renseignements et surtout un point de vue sur la lettre:
Vous pouvez télécharger des extraits de cahiers et devoirs, dont des copies de certificat d’études primaires, rédigés par des jeunes filles de cours moyen et cours supérieur (11-13 ans) entre 1900 et 1920 :
https://www.reseau-canope.fr/musee/collections/fr/museum/favourites?cont=cont-608baaacc72cf
Vous pouvez voir que l’écriture de Mathilde correspond à ce qui était attendu d’élèves de fin de scolarité obligatoire, à savoir 13 ans à cette époque. Le Munaé conserve des travaux d’élèves encore plus anciens et très bien conservés, mais il est vrai qu’ils n’ont pas passé plus de 100 ans dans l’eau. Le Munaé ne possède pas de liste de candidates reçues au certificat d’études dans le Pas-de-Calais dans les années 1910.
Et une étude sur le certificat d’étude :
https://www.reseau-canope.fr/musee/fr/etudier/dossiers-documentaires.html
Merci à M. COUTANT et son équipe, pour son aide rapide.
Etape 2: la Bouteille
Nous avons décidé de contacter un ingénieur « Chef de service Compo fusion élaboration des verres » chez un verrier qui existe depuis 1897 et qui nous a promis de nous faire part de ses commentaires sur la bouteille, et de nous fournir des informations sur la chimie des verres au travers des âges, ainsi que les adresses où l’on pourrait faire dater très précisément celle-ci si nécessaire, à priori en Belgique.
Il va regarder les documents et reviendra vers nous dans le courant de la semaine prochaine. Il nous précisera alors, s’il intervient à titre personnel ou au nom du service communication de son entreprise.
Etape 3: les Courants
La bouteille découverte en juin 2017, a t’elle voyagé pendant 105 ans au gré des flots de l’atlantique ? Nos connaissances scolaires nous parlent de courants qui vont depuis le point de larguage de la bouteille plutôt vers l’Europe que l’Amérique du Nord. D’ailleurs, une autre bouteille jetée le même jour du Titanic est retournée en Irlande en 1 an ! Donc, on pourrait se dire, qu’elle a tourné en faisant 50 tours de l’Atlantique…
Dans la revue de presse, vous verrez aussi des exemples d’autres bouteilles qui ont mis beaucoup moins de temps avant de s’échouer.
Donc, il nous faudra l’avis d’un océanographe pour se forger une opinion, et cela devrait aller vite maintenant car l’engouement sur cette histoire impose à l’université du Québec qui détient la bouteille et la lettre depuis 2017 de se positionner rapidement. Néanmoins, voici un premier commentaire reçu:
En ce qui a trait aux courants marins, vous avez bien raison d’être perplexe. En effet, les courants dominants du nord de l’Atlantique nord sont principalement orientés vers l’Europe, comme l’indique votre schéma. Remarquez cependant que le schéma ne montre que les courants moyens. Dans la réalité il y a une grande variabilité de ces courants. Un objet à la dérive ne suivrait pas exactement la direction de ces courants comme si c’était sur une autoroute. Ces représentations schématiques des courants sont ainsi un peu trompeuses. Un objet flottant à la dérive ferait 1001 méandres et pourrait, occasionnellement, partir dans une toute autre direction improbable. Nous avons fait des analyses beaucoup plus poussées des courants de cette région de l’Atlantique et les conclusions que nous tirons sont essentiellement les mêmes que celles que vous avez tirées vous-mêmes: La probabilité qu’une bouteille larguée du Titanic le 13 avril 1912 se retrouve sur les côtes canadiennes est vraiment très faible, mais pas complêtement nulle.
Nous sommes impatients d’en savoir plus …